Tene quod bene : préserver et renforcer la politique (para)fiscale de R&D

Il est temps de changer de route 

Outre un environnement compétitif et des talents suffisants, l’ancrage de l’industrie technologique en Belgique dépend de la proximité de la recherche et du développement (R&D). Plusieurs études (BNB, Eurostat, etc.) le confirment et la Commission européenne souligne également dans son Plan stratégique 2020-2024 que la R&D est l’une des politiques les plus puissantes pour stimuler les économies et la compétitivité de l’Union à l’échelle mondiale.


Une 5e place grâce à des dépenses importantes

Le tableau de bord européen de l’innovation 2023 classe la Belgique parmi les cinq leaders de l’UE en matière d’innovation, aux côtés des Pays-Bas, de la Suède, de la Finlande et du Danemark. Nous sommes particulièrement bien placés en termes d’efforts d’innovation. Ce résultat s’explique en grande partie par la forte augmentation des dépenses en recherche et développement. C’est le cas pour 74 % des entreprises. Les mesures de soutien et de stimulation prises par les pouvoirs publics jouent un rôle crucial. La Belgique obtient de moins bons résultats en ce qui concerne la conversion de la R&D en exportations de biens et d’applications de conception, ainsi que pour les technologies liées à l’environnement. Notre pays souffre également d’une pénurie de talents : l’apprentissage tout au long de la vie, la disponibilité des travailleurs possédant des compétences numériques supérieures à la moyenne et la mobilité entre les emplois dans les domaines de la science et de la technologie sont des points négatifs.

Les derniers chiffres de BELSPO le confirment. Tant en termes de dépenses que de chercheurs employés, notre pays a connu une augmentation relativement forte ces dernières années. Une R&D solide peut constituer la base d’écosystèmes entre les acteurs privés et publics et inciter à l’établissement d’installations de production.

Annonces, réformes et contrôles disproportionnés sapent la confiance dans le système de R&D

En 2022 et au début de 2023, la Belgique a compromis à plusieurs reprises l’attractivité de son système de recherche et développement. Après chaque discussion budgétaire, proposition de réforme fiscale ou transposition de la législation européenne, le système a invariablement été remis en question. Cela érode la confiance des entreprises dans ce régime. Voici quelques exemples d’erreurs commises, selon Agoria : 

  • Le nouveau régime pour les contribuables et chercheurs entrants (1/1/2022), qui remplace l’ancien régime d’imposition spécial pour les expatriés. Si la consécration juridique du régime des expatriés était nécessaire, les conditions d’application ont été considérablement durcies. Tout cela alors que la mobilité du personnel hautement qualifié en Belgique est inférieure à la moyenne européenne – une faiblesse de notre pays selon le tableau de bord européen de l’innovation du 22 septembre 2022
  • Les relations difficiles entre les contribuables et les administrations concernées lors des contrôles fiscaux sur l’exonération du précompte professionnel sur la R&D de 2021 et 2022. Au cours de ce processus, les avis de BELSPO sont remis en question et les erreurs matérielles et les manquements formels sont sanctionnés de manière disproportionnée et sévère. 
  • Les conclusions erronées des litiges déclarés entre les contribuables et l’administration fiscale. Nous nous référons aux avant-projets de la réforme fiscale du ministre des finances du 2 mars 2023 sur l’exonération de la retenue à la source en matière de recherche et développement. Sous couvert de « promouvoir la sécurité juridique », cette réforme aboutit exactement à l’inverse. Cela se traduit, entre autres, par une augmentation disproportionnée de la charge administrative pour les entreprises et les PME en particulier, par un affaiblissement du rôle de BELSPO et par un soutien réduit.

Outre le cadre (fiscal) qui crée le contexte environnemental dans lequel les activités de R&D peuvent se développer, le gouvernement lui-même est également actif dans un certain nombre d’autres domaines importants pour l’industrie technologique. Par exemple, il prévoit de financer la R&D en matière de sécurité et de défense par le biais de la Stratégie de défense, d’industrie et de recherche (DIRS) et participe à un certain nombre de programmes de recherche internationaux dans les domaines de l’espace (ESA), de l’énergie (ITER) et de la défense (par le biais du Fonds européen de la défense et du programme d’innovation de l’UE en matière de défense).


Roadmap pour une prospérité durable

Selon Agoria, notre pays doit mener une politique forte pour maintenir et renforcer sa position européenne en matière de R&D et d’innovation. Il en va de l’intérêt de notre économie de la connaissance et de la prospérité qu’elle apporte à la population belge. Maintenir et renforcer notre système actuel d’incitants fiscaux (2022) et son accessibilité pour les start-ups et les PME technologiques. 

Il s’agit des mesures suivantes : 

#1 Assouplir les conditions d’application des régimes des contribuables et chercheurs entrants. 

 

#2 Renforcer la déduction fiscale/le crédit d’impôt pour les investissements en R&D, en mettant l’accent sur les investissements qui répondent à des objectifs sociétaux (par exemple, le Green Deal, la révolution numérique). 

 

#3 Réformer la déduction pour innovation en tenant compte des évolutions internationales et européennes (piliers 1 et 2), en vue de maintenir cet incitant fiscal.

 

#4 Renforcer et garantir la sécurité juridique (avec le rôle de BELSPO en particulier) de l’exonération du précompte professionnel sur la R&D. 

 

#5 Continuer à investir dans les programmes de recherche fédéraux, notamment dans les domaines de l’espace, de l’énergie nucléaire, etc. 

 

#6 Un engagement pour des marchés publics innovants : les marchés publics 2.0 

Agoria préconise un engagement à consacrer une partie du budget à l’acquisition de produits, services ou processus innovants.

Technology for a better world 

Dans notre rapport de durabilité, l'un des domaines d'impact concerne l'innovation technologique.. Nous y formulons entre autres, notre engagement à prendre en charge 1/3 des dépenses de R&D de l’industrie belge à partir de l’industrie technologique et à mettre sur le marché, d’ici 2030, cinq technologies révolutionnaires porteuses d’une valeur ajoutée pour la société. Pour y parvenir, le cadre réglementaire de la R&D doit être maintenu et renforcé.

Lisez nos recommandations pour d'autres niveaux de gouvernement.