Une réforme complète de notre culture fiscale

Il est temps de changer de route 

La Belgique souffre d'une pression fiscale et parafiscale considérable. Pourtant, nous avons toujours un déficit public de 5 % du PIB. Les dépenses publiques sont donc trop élevées et doivent être réduites de toute urgence pour diminuer la pression fiscale. En outre, notre système fiscal souffre principalement de la pression fiscale record sur le travail et d’une sécurité juridique précaire. Notre pays obtient de bons résultats en termes de soutien (para)fiscal à la R&D et à l’innovation, mais ce soutien a été rongé de diverses manières au cours de la dernière législature. Enfin, la Belgique a également besoin d’une fiscalité verte pour s’engager pleinement dans la transition écologique.


Pression fiscale problématique sur le travail

Selon de nombreuses organisations (internationales), telles que le FMI, l'OCDE ou le Conseil supérieur des Finances, la pression fiscale sur les revenus du travail dans notre pays est problématiquement élevée. En comparaison avec d'autres pays de l'UE, en Belgique, une personne ayant un revenu moyen sans enfants à charge supporte la charge fiscale la plus élevée. En effet, celle-ci dépasse la barre des 50 %. En d'autres termes, exprimé en pourcentage du coût salarial, plus de la moitié revient à l'État, ce qui constitue un désavantage compétitif significatif.

Une étude de la FEB montre que les revenus moyens et élevés en particulier doivent supporter des impôts déraisonnablement élevés. Les personnes qui ont les revenus les plus faibles (équivalant à 50 % du revenu médian, soit environ le montant du revenu minimum) sont celles qui conservent le plus de revenu net par rapport à nos pays voisins. La cause principale en est le bonus à l’emploi social et fiscal qui ne concerne que les bas revenus. Une analyse de la période 2001-2020 montre que sur 20 ans, le revenu disponible a fortement augmenté, en particulier pour les bas salaires (jusqu’à 16 % du revenu brut).

La pression fiscale étouffante sur les revenus moyens et élevés découle notamment du fait que les taux d'imposition marginaux sur le revenu en Belgique sont relativement élevés et augmentent rapidement à mesure que le salaire brut augmente. En outre, les cotisations de sécurité sociale ne sont pas plafonnées. Le graphique suivant (FEB) illustre cette situation.

Au cours de la dernière législature, une tentative a été faite pour inverser la tendance et réduire la fiscalité sur tous les revenus du travail en organisant un transfert de charge fiscale vers d'autres contributeurs fiscaux. Finalement, cela s'est révélé impossible. Pourtant, cela reste nécessaire, d’autant plus que la motivation d’une main-d’oeuvre talentueuse et instruite est de plus en plus importante pour notre compétitivité.

Une sécurité juridique fragile

Notre système fiscal devient de plus en plus complexe et les obligations administratives (déclaratives) des entreprises de plus en plus étendues, lourdes et coûteuses. En outre, les nouvelles législations sont souvent votées sans consultation appropriée et/ou sans tenir compte des commentaires des entreprises et de leurs représentants. Il en va de même pour les problèmes de mise en oeuvre qu’ils signalent. 

Des accords avec l’administration, des instructions administratives, des avis contraignants d’organismes tels que le BELSPO et même des décisions individuelles du Service des Décisions anticipées en matière fiscale sont remis en question, avec effet rétroactif. Autre problème : des conclusions erronées sont tirées. Le Service des Décisions anticipées en matière fiscale fonctionne actuellement bien, de manière indépendante et objective. Le réformer, comme l’a proposé le ministre des Finances lors de la discussion sur la réforme fiscale, n’est pas nécessaire et va dans la mauvaise direction. 

Aujourd’hui, dans le cadre de la lutte contre la fraude, les droits des contribuables de bonne foi sont mis à mal. En outre, les délais d’enquête sont prolongés sur la base de comparaisons incomplètes et erronées avec les pays voisins, et des sanctions de plus en plus sévères sont imposées même pour de simples erreurs ou omissions.

La charge fiscale sur le travail n’est pas le seul aspect pertinent dans le contexte de la politique fiscale. Nous examinons également dans ce mémorandum la fiscalité dans le domaine de la R&D (voir le chapitre R&D & innovation) et le tax shift vert (voir le chapitre Énergie & climat).


Roadmap pour une prospérité durable

#1 Réduire les taux d’imposition et l’abattement fiscal, diminuer et élargir les tranches d’imposition et supprimer la contribution spéciale de sécurité sociale. 

Notre système fiscal actuel comporte 4 tranches et 4 taux d’imposition. En raison de la faible étendue des tranches d'imposition inférieures, il est beaucoup trop progressif. Cette forte progressivité, combinée à la gamme étendue d'avantages sociaux, d'allocations, de primes et de réductions fédérales, régionales, locales et autres pour les faibles revenus nous confronte en Belgique à des problèmes de pièges au chômage et à la promotion supérieurs à la moyenne de l'UE.

Il convient donc de réduire le nombre de tranches d’imposition, avec un taux d’imposition de 45 % pour la tranche la plus élevée. Ainsi, la charge fiscale effective sur les revenus professionnels, compte tenu de la taxe communale additionnelle (0,9 %), restera inférieure à 50 % pour le contribuable. 

 

#2 Maintenir une rémunération flexible. 

Les entreprises belges devraient disposer de suffisamment de marge et de possibilités pour adapter la rémunération de leurs collaborateurs à leurs besoins afin de pouvoir attirer et conserver les talents nécessaires et donc d’être compétitives. En matière de mobilité, nous prenons comme exemple le budget de mobilité existant. 

En outre, les entreprises devraient être en mesure de conserver leurs collaborateurs talentueux à moyen et à long terme. C’est pourquoi il convient de ne pas imposer les rémunérations à long terme, quelle que soit leur forme (bonus en espèces, actions, options sur actions, etc.) conjointement à des taux progressifs, mais séparément à un taux forfaitaire attrayant (par exemple, 25 %). En effet, le bénéficiaire n’en dispose pas immédiatement. 

Dans ce contexte, il convient également de soutenir les employeurs qui investissent massivement dans la formation afin de former des collaborateurs talentueux et de les retenir. Nous préconisons donc une augmentation de la déduction des coûts de formation jusqu’à 150 %.

 

#3 Maintenir le régime de pension complémentaire (2e pilier). 

Dans le passé, les entreprises et les indépendants étaient appelés à résoudre ce problème. Grâce à un régime fiscalement avantageux, les entreprises, leurs salariés et les indépendants sont encouragés à se constituer une pension complémentaire pendant leur carrière active. Ceci afin de soutenir leur niveau de vie après la retraite. 

Agoria plaide pour le maintien d’un régime fiscal attractif pour la constitution de pensions complémentaires. De cette manière, les entreprises, leurs collaborateurs et les indépendants sont encouragés en permanence à anticiper et à se constituer une pension complémentaire. Les modifications des régimes existants ne doivent concerner que l’avenir. Les modifications qui portent atteinte aux promesses et/ou aux attentes en matière de pension fondées sur des régimes de pension complémentaire légalement valables dans le passé sont totalement inacceptables. 

 

#4 Ne pas faire peser sur les employeurs le poids du financement d’une réforme du système fiscal visant à récompenser davantage le travail (supplémentaire). 

La suppression de certains avantages fiscaux ayant un impact positif sur la compétitivité des employeurs mettrait en difficulté les entreprises belges et, par voie de conséquence, l’économie belge. De plus, l’emploi des contribuables actifs, et donc leur revenu professionnel, seraient complètement menacés. 

Il faut donc faire appel à d’autres sources pour financer la réforme du système d’imposition revenus d'activité. Les sources possibles sont les suivantes : 

  • la simplification des déclarations d’impôt sur le revenu des personnes physiques (y compris l’élimination de toutes sortes de déductions fiscales) ; 
  • les effets de retour d’une telle réforme ; 
  • l’amélioration de la structure existante de l’État, la réduction de la mainmise de l’État et l’amélioration de l’efficacité de l’État ; 
  • la réforme de la taxe à la consommation ; 
  • l’écologisation de la fiscalité.

 

#5 Travailler à une gouvernance fiscale plus appropriée et plus transparente. 

Avant d’élaborer des modèles de conformité fiscale coopérative et de surveillance horizontale, il convient de rétablir le respect et la confiance mutuelle entre l’administration fiscale et les entreprises. L’amélioration de la collaboration avec l’administration fiscale, sur la base d’une coopération authentique et transparente, peut apporter une contribution importante. Cela implique la réalisation et le partage d’études d’impact et la prise en compte des préoccupations, des problèmes envisagés et des plaintes du monde des entreprises. Les problèmes et les questions d’application pratique recevraient ainsi plus rapidement des réponses appropriées dans les instructions administratives (circulaires, etc.) et une meilleure législation verrait le jour. 

 

#6 Maintenir et renforcer le système de ruling belge actuel. 

La sécurité juridique est essentielle pour les investisseurs et les entreprises. Il est important qu’ils obtiennent à l’avance une certitude juridique quant à l’application des règles fiscales dans la pratique, et qu’un autre service d’audit ou d’inspection de l’administration fiscale ne puisse pas la remettre en question par la suite. 

 

#7 Revoir la procédure et les délais d’audit et d’enquête, rétablir l’équilibre des droits et obligations entre l’administration et les contribuables, et revoir les pénalités souvent excessives. 

 

#8 Améliorer les applications numériques et procéder à une simplification administrative. 

Avant tout, rationaliser et réduire les exigences en matière de rapports..

Technology for a better world 

Un système fiscal qui encourage le travail est nécessaire pour réaliser notre engagement de créer 40 000 emplois supplémentaires d’ici 2030. Une fiscalité qui permet une rémunération flexible est également importante pour rémunérer les gens de manière durable et correcte. Un cadre juridique sûr offre la confiance, la transparence et la perspective de pouvoir ancrer des activités à long terme dans notre pays.

Lisez nos recommandations pour d'autres niveaux de gouvernement.